j'ai vu le Cid aussi... le résumé de Roby colle plutôt bien.
En effet, Chimène et Rodrigue n'ont qu'une idée en tête : crier leur amour et leur désespoir. Je caricature à peine. Je sais que Le Cid est une pièce sur le pouvoir, mais de là à permettre à Chimène d'enguirlander son roi. Le discours qu'elle tient lorsqu'elle exige la tête du Cid contre la volonté du Roi suffit bien à justifier le fait que celui-ci la rabroue. Elle n'a pas besoin de hurler sur le souverain pour ça.
Florilège des cris et hurlements :
Don Diègue et le Comte, pris dans les affres de la lutte de pouvoir et de la jalousie, se crient le fond de leur pensée. on aboutit au coup de gant et au duel avorté, Don Diègue étant trop faible (la vieillesse est un naufrage). Etalé sur la scène, il nous livre allongé sa fameuse tirade du "O rage, O désespoir etc". Puis il exige de son fils Rodrigue qu'il venge son honneur en combattant le comte, père de Chimène, la bien-aimée de Rodrigue (vous suivez toujours ?).
Pris entre son amour et son devoir, Rodrigue crie son dilemme à son épée ; quelques scènes plus tard, ayant accompli son devoir, il crie son désespoir à son père. Pendant ce temps,Chimène crie son désespoir filial auprès du roi et demande vengeance (loi du talion oblige). Dans la nuit, qui suit, Rodrigue vient voir Chimène dans son jardin : l'un et l'autre se crient leur amour et le devoir auquel chacun s'est soumis (des fois que le public, à défaut d'être stupide, soit un peu sourd). Commentaire de la ptite dame assise à ma gauche (et qui sentait l'ail... un vrai bonheur
) : "Cette scène est magnifique, je comprends mieux le choix de Rodrigue..." Faudra qu'elle m'explique : à part jouer de façon exagérée, je ne vois pas...
Acte suivant : Encouragé par son père, qui lui a crié de ne pas se suicider et de chercher plutôt la mort au service de son roi, Rodrigue mène une armée contre les Maures. Il revient vainqueur.
Jusque là vêtu de blanc, le Cid nous revient en noir : c'est le signe de sa maturité, de son accomplissement et de son sacrifice au profit des valeurs aristocratiques (honneur et devoir politique ou filial) ; de même, Chimène, jusque là vêtue de blanc, porte désormais le deuil et donc est habillée de noir. Une symbolique d'une finesse insoupçonnable... : les héros ont perdu leur innocence première, celle qui leur permettait de croire que leur amour était la chose la plus importante qui existât, pour entrer dans un âge adulte, fait de soumissions et de compromissions. Mon analyse est à peu près aussi fine que la mise en scène.
Autre passage d'anthologie : "Nous partîmes 5OO mais par un prompt renfort..." : oui, mais si tu pouvais cesser de hurler... je sais que tu es submergé par l'émotion, mais de là à crier face à ton roi, quand même...
Il crie à tel point qu'on comprend à peine le texte. C'est énervant et fatiguant à la longue.
Chimène, là-dessus, revient crier (non pas demander tout simplement) vengeance. L'infante d'Espagne, elle, crie seule son amour pour Rodrigue, une fois de plus.
Don Sanche intervient et se fait le champion de Chimène : il provoque Rodrigue en combat singulier. Lorsqu'il revient l'épée à la main, Chimène ne lui laisse pas le temps de s'expliquer et lui crie tout le mal qu'elle pense de lui et tout le bien qu'elle pense de Rodrigue, qu'elle se met illico à pleurer devant tout le monde (y compris le roi).
Le hic, c'est que Rodrigue n'est pas mort du tout et qu'il a épargné Don Sanche, venu annoncer la nouvelle à Chimène (on voit comme il s'est fait recevoir, n'ayant pas eu le temps d'en placer une mais ça c'est bien dans le texte d'origine).
A l'issue de ce résumé, je me demande dans quelle mesure Le Cid est en réalité une pièce sur le langage et non sur le pouvoir... Encore un truc de prof de français, faites pas attention.
PS : contrairement à ce qu'on pourraut croire, la mise en scène, les costumes et les décors sont tout ce qu'il y a de classique.